Une « presse à nanoparticules »
Les nanoparticules d’or possèdent des propriétés optiques, électroniques et chimiques étonnantes que les scientifiques cherchent à mettre à profit dans diverses applications allant de la nanoélectronique au traitement du cancer.
Certaines des propriétés les plus intéressantes se concrétisent lorsqu’on assemble les nanoparticules en grappes de quelques particules ou en cristaux constitués de millions d’entre elles. Toutefois, il est très difficile de manipuler des particules d’à peine quelques millionièmes de pouce à l’aide des instruments de laboratoire courants. Les scientifiques doivent donc trouver le moyen non seulement d’assembler ces pépites d’or, mais aussi de sculpter à leur guise cet agencement tridimensionnel.
L’une des techniques explorées repose sur l’utilisation de minuscules structures constituées de brins d’ADN synthétiques. Sachant que les brins d’ADN sont programmés pour s’associer à d’autres brins dans des configurations caractéristiques, les chercheurs ont fixé des brins d’ADN à la surface de particules d’or, créant ainsi des assemblages variés. Toutefois, ces hybrides or ADN sont des nanostructures complexes et coûteuses à fabriquer, ce qui limite leurs utilisations pratiques. À titre de comparaison, c’est un peu comme si on fabriquait un livre à la main.
C’est ici qu’entre en scène la « presse Ă nanoparticules ». Efficace et rĂ©utilisable, elle renferme une quantitĂ© d’information inĂ©galĂ©e Ă ce jour. Dans un article publiĂ© sur le site de Nature Chemistry, des chercheurs du DĂ©partement de chimie de l’UniversitĂ© łÉČËVRĘÓƵ dĂ©crivent une mĂ©thode permettant de fabriquer une structure d’ADN suivant un agencement de brins dĂ©fini. Au bout de chaque brin se trouve un « timbre adhĂ©sif » chimique auquel se fixe la nanoparticule d’or lorsqu’elle entre en contact avec la nanostructure d’ADN. Le complexe ainsi formĂ© est ensuite dissous dans de l’eau distillĂ©e : la nanostructure se dĂ©compose alors en ses multiples brins, et l’empreinte d’ADN reste sur la nanoparticule d’or (voir l’image).
Source : Thomas Edwardson
« Ces nanoparticules d’or encodĂ©es renferment une information d’une richesse sans prĂ©cĂ©dent », explique Hanadi Sleiman, auteure en chef et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en nanoscience de l’ADN. « Quant aux nanostructures d’ADN, elles peuvent ĂŞtre rĂ©utilisĂ©es, un peu comme la matrice d’une ancienne presse Ă imprimer. »Â
Du vitrail Ă l’´Ç±čłŮ´ÇĂ©±ô±đł¦łŮ°ů´Ç˛Ôľ±±çłÜ±đ
Certaines des propriétés des nanoparticules d’or sont connues depuis des siècles. Au Moyen Âge, les artisans ajoutaient du chlorure d’or au verre en fusion pour obtenir la couleur rubis utilisée dans les vitraux. Ce n’est que bien plus tard que les chimistes allaient expliquer cet effet, attribuable aux propriétés de diffusion de la lumière des petites particules d’or.
Les chercheurs de łÉČËVRĘÓƵ espèrent que leur mĂ©thode ouvrira la voie Ă l’utilisation des nanoparticules porteuses d’ADN dans diverses technologies de pointe. Les chercheurs de łÉČËVRĘÓƵ entendent maintenant Ă©tudier les propriĂ©tĂ©s des structures fabriquĂ©es Ă partir de ces nouveaux Ă©lĂ©ments constitutifs, indique Thomas Edwardson, auteur principal. « Un peu comme les atomes s’assemblent pour former des molĂ©cules complexes, les particules d’or codĂ©es par des sĂ©quences d’ADN peuvent s’hybrider aux particules avoisinantes pour former des assemblages bien dĂ©finis. »
Ces nanoparticules hybrides pourraient ĂŞtre intĂ©grĂ©es Ă des nanodispositifs ´Ç±čłŮ´ÇĂ©±ô±đł¦łŮ°ů´Ç˛Ôľ±±çłÜ±đs ou utilisĂ©es Ă des fins biomĂ©dicales, affirment les chercheurs. Par exemple, en configurant les brins d’ADN de manière Ă ce qu’ils ciblent des protĂ©ines spĂ©cifiques Ă la surface de cellules cancĂ©reuses, on pourrait dĂ©tecter des cancers ou dĂ©truire de façon sĂ©lective des cellules cancĂ©reuses.Â
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Cette étude a été financée par le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, la Fondation canadienne pour l’innovation, le Centre de recherche sur les matériaux autoassemblés, le Programme de chaires de recherche du Canada et les Instituts de recherche en santé du Canada.
L’article « Transfer of molecular recognition information from DNA nanostructures to gold nanoparticles », de Thomas G. W. Edwardson et coll., a été publié dans Nature Chemistry le 4 janvier 2016. DOI: 10.1038/nchem.2420