Chandra permet de faire le lien entre un Pulsar et une Supernova
SAN DIEGO ? Grâce au télescope spatial à rayons-X Chandra de la NASA, des chercheurs ont mis à jour de nouvelles preuves que le pulsar de la constellation du Sagittaire résulte bel et bien d’une explosion stellaire survenue en 386 après J.-C., d’après les astronomes chinois qui en ont été témoins. Si ces preuves sont confirmées, il s’agira du deuxième pulsar clairement associé à un phénomène historique.
Ces résultats ont été présentés le 10 janvier dernier par Victoria Kaspi et Mallory Roberts de l’Université ³ÉÈËVRÊÓƵ à l’occasion de l’assemblée de l’American Astronomical Society. Ont également participé à ces recherches Gautum Vasisht du Jet Propulsion Laboratory, Eric Gotthelf de l’Université Columbia, Michael Pivovaroff de Therma-Wave Inc. et Nobuyuki Kawai de l’Institut de recherche physique et chimique du Japon.
Les chercheurs ont utilisé Chandra pour localiser le pulsar qui se trouve exactement au centre géométrique des vestiges de la supernova G11.2-0.3. Cet emplacement fournit la preuve quasi-irréfutable que le pulsar, étoile à neutrons qui effectue 14 rotations en une seconde, a été formé dans la supernova de 386 après J.-C. et que celui-ci est donc âgé de 1615 ans.
« Déterminer l’âge exact des objets astronomiques est notoirement difficile et pour cette raison, les dossiers historiques consacrés aux supernovae sont d’une importance capitale »,précise Victoria Kaspi, professeur et titulaire de la chaire de recherche du Canada au département de physique de ³ÉÈËVRÊÓƵ. Au cours des 2 000 dernières années, moins de dix rapports de supernovae possibles ont été archivés, la plupart par des astronomes asiatiques. Les vestiges de 1054 AD ou Nébuleuse du Crabe étaient jusqu’à présent le seul pulsar dont la naissance pouvait être associée avec un événement historique et donc la seule étoile à neutrons dont on connaissait l’âge exact.
Entre la mi-avril et la mi-mai de l’an 386 après J.-C., une jeune « étoile invitée », vraisemblablement une supernova, a été observée par les astronomes chinois dans la constellation du Sagittaire. Dans les années 1970, des astronomes ont découvert une nébuleuse gazeuse en expansion formée de particules de haute énergie, baptisée G11.2-0.3, qui semble être les vestiges de cette explosion. En 1997, une équipe d’astronomes spécialistes des rayons-X ont découvert un pulsar dans la même région du ciel grâce au satellite japonais ASCA. Les tentatives qui avaient été faites auparavant pour associer le pulsar à G11.2-03, et corroborer ce faisant le fruit des anciennes observations chinoises, avaient été très controversées. Chandra permet de faire le lien entre un Pulsar et une Supernova (suite).
L’emplacement du pulsar au cœur des vestiges de la supernova fournit la preuve de son lien avec cette dernière. Puisque les pulsars s’éloignent rapidement de l’endroit où ils ont été formés, l’existence d’un pulsar à proximité du centre signifie que le système doit être très jeune et que le pulsar n’a pas encore eu le temps de s’éloigner du lieu de sa naissance.
« Nous pensons que le pulsar et la supernova G11.2-0.3 sont probablement les vestiges de l’explosion observée par les astronomes chinois il y a 1 600 ans », déclare Mallory Roberts. « Même si cette découverte est exceptionnelle, elle soulève de nouvelles questions sur ce que nous savons des pulsars, notamment sur leurs origines. »
Ces questions procèdent de l’écart qui a été constaté lorsque l’équipe ASCA a appliqué la vitesse actuelle du spin aux modèles en cours pour déterminer l’âge approximatif du pulsar et le comparer à l’âge de G11.2-0.3. Les résultats donnent 24 000 ans environ ? ce qui est très largement antérieur à 386 après J.-C.
Pour expliquer cette contradiction, l’équipe de l’observatoire Chandra postule que la vitesse du spin du pulsar est peut-être approximativement la même aujourd’hui qu’à sa naissance, comme le donnent à penser les données de l’ASCA. Si cela est vrai, cela pourrait avoir des conséquences importantes sur les connaissances traditionnelles au sujet des pulsars, lesquels pourraient avoir à la naissance une vitesse de rotation beaucoup plus lente que ce que l’on avait pensé auparavant.
« Nous disposons d’ores et déjà de preuves solides voulant que l’âge standard approximatif de ce pulsar est probablement faux et qu’il est beaucoup plus jeune que ce que l’on avait cru », précise Victoria Kaspi. « Cela donne également à penser que d’autres évaluations de l’âge standard des pulsars peuvent être faux, ce qui aura d’importantes conséquences sur l’ensemble des pulsars connus. »
Outre ces résultats, les observations que Chandra a faites de G11.2-0.3 ont pour la première fois révélé l’apparence d’un plérion au centre de la supernova. Sa forme, qui ressemble vaguement à celle d’un cigare, contraste avec les arcs gracieux observés autour des pulsars de la constellation du Crabe et du Voile. Toutefois, avec ces pulsars, G11.2-0.3 fournit la preuve que ces structures compliquées sont douées d’ubiquité autour des jeunes pulsars. Cela ne laisse pas de surprendre les astronomes.
Le télescope Chandra a observé G11.2-0.3 au moyen du spectromètre à réseau à haute énergie CCD à deux reprises : le 6 août 2000 et le 15 octobre 2000, respectivement pendant 20 000 et 15 000 secondes.
Le télescope à rayons-X ACIS a été conçue pour la NASA par l’Université de Pennsylvanie et le MIT. Le Marshall Space Flight Center de la NASA à Huntsville, en Alabama, s’occupe du programme de Chandra. TRW Inc. de Redondo Beach en Californie est le principal constructeur de l’engin spatial. Le Centre Chandra de la Smithsonian Institution contrôle les activités scientifiques et les missions depuis Cambridge au Massachusetts.
Outre leur affectation à l’Université ³ÉÈËVRÊÓƵ, Victoria Kaspi est également affiliée au Massachusetts Institute of Technology et Mallory Roberts est chercheur post-doctoral du Québec. Les fonds pour ces recherches ont été fournis par la NASA, le NSF et le CRSNG (Canada).