Pour de meilleurs soins psychologiques aux victimes des conflits et des changements climatiques
Les violents conflits, la migration forcĂ©e et l’intensification des catastrophes naturelles sous l’effet des changements climatiques multiplient les crises humanitaires dans le monde entier. C’est sur cette toile de fond qu’une nouvelle initiative en santĂ© mentale voit le jour Ă l’UniversitĂ©Â łÉČËVRĘÓƵ, grâce au don visionnaire de Noubar Afeyan (B.Ing. 1983, D.Sc. 2022), fondateur et PDG de Flagship Pioneering, et cofondateur et prĂ©sident de Moderna, et de sa femme, Anna Afeyan Gunnarson.
D’un montant de 2 millions de dollars américains (environ 2,7 millions de dollars canadiens), le don du couple financera la création d’un programme de recherche sur la mise en œuvre d’un meilleur soutien psychologique et psychosocial à l’École de santé des populations et de santé mondiale de l’Université, sous la direction de Jura Augustinavicius, professeure adjointe et chercheuse en santé mentale dans le contexte des changements climatiques et des crises humanitaires.
« Je tiens Ă exprimer ma gratitude Ă Anna et Noubar Afeyan, engagĂ©s de longue date dans l’action humanitaire, pour leur gĂ©nĂ©reux don Ă l’UniversitĂ©, a dĂ©clarĂ© Deep Saini, recteur et vice-chancelier de łÉČËVRĘÓƵ. Ce programme nous apportera de prĂ©cieuses connaissances en vue d’amĂ©liorer le soutien psychologique prodiguĂ© aux personnes qui traversent de terribles Ă©preuves dans des rĂ©gions en crise, et il offrira une occasion d’apprentissage exceptionnelle Ă nos Ă©tudiantes et Ă©tudiants. »
L’action humanitaire est l’une des principales raisons d’être de la Fondation Afeyan que le couple a établie en 2000.
Les grands-parents de Noubar Afeyan Ă©taient des survivants du gĂ©nocide armĂ©nien, et sa famille a fui le Liban en 1975, en pleine guerre civile, pour se rĂ©fugier Ă MontrĂ©al. Il a obtenu un diplĂ´me en gĂ©nie chimique de łÉČËVRĘÓƵ, puis a poursuivi ses Ă©tudes doctorales au Massachusetts Institute of Technology (MIT). Ce visionnaire et entrepreneur passionnĂ© a connu un immense succès. Sa sociĂ©tĂ©, Flagship Pioneering, a fondĂ© plus de 70 entreprises innovantes en sciences de la vie, dont la plus notoire est Moderna, qui a dĂ©veloppĂ© le vaccin rĂ©volutionnaire Ă ARNm contre la COVID-19.
« Le monde est secouĂ© de polycrises provoquĂ©es entre autres par les changements climatiques, les guerres et les troubles Ă©conomiques, avec des consĂ©quences de plus en plus lourdes sur les populations qui nĂ©cessitent des solutions multiples, affirment Noubar et Anna Afeyan au nom de leur fondation. Le programme de recherche de łÉČËVRĘÓƵ sur les besoins en santĂ© mentale et en soutien psychosocial des victimes de ces crises sera crucial pour amĂ©liorer les vies des plus vulnĂ©rables dans un monde de plus en plus bouleversĂ©. »
Ce don et le lancement du programme arrivent à point nommé, alors qu’on voit s’accroître la fréquence et la gravité des conflits et des catastrophes naturelles généralement causées ou exacerbées par les changements climatiques. Dans ce contexte, la professeure Augustinavicius souligne l’urgence d’apporter une meilleure aide psychologique, plus intégrée, aux populations en détresse. On estime en effet que 22 % des personnes dans les zones humanitaires, soit plus d’une sur cinq, éprouvent un problème de santé mentale.
« Nous sommes actuellement incapables de répondre à ces besoins d’aide psychologique, qui ne cessent d’augmenter avec les risques posés par les changements climatiques, déplore la professeure. Nous ne sommes absolument pas préparés à cela. »
D’une durée de cinq ans, le projet de recherche vise à intégrer le soutien en santé mentale aux autres programmes offerts dans les zones humanitaires, par exemple en matière d’éducation, d’aide financière, de protection, de gestion des risques de catastrophes ou d’adaptation aux changements climatiques, afin de toucher plus de gens. « Malheureusement, dans notre domaine, la prestation de soins en santé mentale est souvent cloisonnée », pointe la chercheuse.
Elle fait observer que les problèmes de santé mentale ne surviennent pas sans raison; ils émergent ou sont intensifiés lorsque des besoins essentiels ne sont pas remplis. C’est particulièrement le cas des personnes qui fuient un conflit ou une catastrophe environnementale : elles sont aux prises avec d’énormes difficultés. « De telles situations accentuent les besoins, poursuit la professeure. Or, lorsque nous prodiguons des soins psychologiques de manière isolée dans un contexte humanitaire, nous nous attaquons uniquement aux problèmes de santé mentale qui, en réalité, peuvent être provoqués ou intensifiés par d’autres événements de la vie. Dans le cadre du programme, nous chercherons des moyens de répondre à tous les besoins et d’aider les victimes où qu’elles se situent. »
Aux fins de l’étude initiale, trois zones humanitaires seront sélectionnées dans différentes régions du monde, probablement en Amérique latine, dans le Caucase et en Asie du Sud-Est. La professeure Augustinavicius et son équipe travailleront auprès de fournisseurs de services humanitaires et de victimes, afin de concevoir un modèle d’intervention en santé mentale intégré pour chaque région. L’équipe évaluera ensuite si ces modèles répondent efficacement aux besoins et si les organisations humanitaires peuvent facilement les appliquer en situation réelle.
Par ailleurs, ce programme de recherche offrira des occasions de formation à des étudiantes et étudiants, des boursières et boursiers postdoctoraux et du personnel sur le terrain, et sera l’hôte d’un forum humanitaire international sur la résilience psychologique.
« J’espère que ce programme de recherche deviendra un modèle de collaboration intégrée, intersectorielle et interdisciplinaire pour améliorer la santé mentale et le bien-être dans un contexte humanitaire en réponse aux besoins croissants partout dans le monde », souhaite la professeure Augustinavicius.
La chercheuse a exprimé sa gratitude à Noubar et Anna Afeyan pour leur générosité. « Dans ce domaine, nous avons absolument besoin de programmes de recherche, de formation et de partenariats intersectoriels, soutient-elle. Mais ce domaine est depuis longtemps en manque de ressources et négligé, particulièrement dans certains mécanismes de financement traditionnel, et c’est pourquoi ce don revêt une grande importance. »